Un Retour Chez Soi.

[Ti Dragon]

"C'est l'heure de rentrer à la maison... Ouah, déjà 19h. Et il pleut... il va encore falloir que je coure...". J'éteins la lumière, ferme la porte et programme l'alarme de mon petit bureau où j'ai passé la journée à travailler depuis 8h ce matin. "Et une de plus ! Bientôt le week-end. Hauts les cœurs !". Et je quitte le hall d'accueil pour courir en direction de la gare.

Il fait froid, la pluie fouette mon visage, mais cette courte improvisation sportive me réchauffe le corps (en plus de m'essouffler lamentablement !) "Avoir des cheveux courts n'a pas que des avantages... Ah ! Mes cheveux longs... Quoique des cheveux longs mouillés... Je regrette de ne pas avoir pris mon parapluie !".

Enfin, j'arrive au niveau de l'abris sur le quai dans lequel je m'engouffre sans plus attendre. Le souffle haletant, je reste debout emmitouflé dans mon manteau en respirant profondément. Quelques personnes assises discutent entre elles, à voix basses. On entend davantage le clapotis de l'eau sur l'abris, à un rythme régulier, ce qui rend propice le vagabondage de l'esprit dans un autre univers. Mais déjà, voilà mon train qui entre à quai.

Comme très souvent, il s'agit d'un train de remplacement "Bah, sont toujours en retard : 'problème matériel', 'mouvement du personnel', 'incident électrique', etc. les phrases toutes faites ne manquent pas", un véhicule électrique d'un style relativement vieux, tout en métal, qui me rappelle celui que je prenais lorsque j'avais 10 ans. Une fois de plus, ceux qui ont surestimé la longueur du train se retrouve à se précipiter à l'arrière de ce dernier et jouer des coudes afin de trouver une place assise "Ah, les rapaces !". Quant à moi, je rentre tranquillement, même bousculé "à quoi bon me presser ? ... tiens, cette partie du wagon n'est pas éclairée..." et me voilà assis dans un coin d'obscurité, le chauffage bien en route derrière mes jambes "mmmmh... voilà une chose qu'elle est agréable !"

L'agitation de tout à l'heure laisse place à une infinie tranquillité. Le son feutré de quelques voix me parvient, mais il ne s'agit que de marmonnements divers se fondant dans le bruit monotone du train qui se déplace. La paix est revenue. Tout me semble plus calme, plus détendu. Le son des roues métalliques de notre carrosse sur les interstices des rails ajoute au monotone de la route et me berce. Enfin, me voilà seul avec moi-même, perdu dans des pensées, des souvenirs que m'évoque cette ambiance que je crois reconnaître. J'ai l'impression de tous les connaître, de partager avec eux ce moment pourtant si bref. Je crois qu'il s'agit d'une femme... d'un regret... d'un plaisir... d'une amitié... d'une idée de ma jeunesse adolescente jusqu'à mon âge d'enfant adulte. Un grand sentiment nostalgique ("on appelle cela le vague à l'âme, je crois") s'empare de ton mon être. Je frissonne... mais ce n'est pas dû au froid. Je me sens bien, je me sens mal... je fonds dans ce rêve éveillé où plusieurs images me traversent l'esprit... Des moments intimes me reviennent. Des joies, des souffrances, du bonheur, des instants gâchés, des rires et des pleurs. Je crois même qu'il y a eu une belle murge mémorable au milieu de tout ça. "Rah, mais quel imbécile ! J'étais vraiment un p'tit con."

Nous arrivons bientôt à bon port. Mon compagnon (en fait, je ne le connais que de visage) de voyage et moi-même cédons la place à une femme et son enfant. Ce dernier me fixe du regard et me sourit. Il me rappelle quelqu'un. Peut-être est-ce le miroir de celui que je pensais être quand j'avais son âge. Et puis, un sourire est toujours bon à prendre. A quoi bon faire la tête ? Je le lui rends du mieux que je peux mais je crois qu'à force de grandir, on perd cette innocence vis à vis des étrangers. Nous voilà conditionnés pour vivre dans notre microcosme, en ayant peur de l'autre, en le méprisant presque. Pourtant, je me sens proche de ces gens... A cet instant précis.

Je descends de mon train. Une fois de plus, je cours pour atteindre mon bus qui, déjà, s'en allait pour me laisser patienter encore dix minutes dans le froid et la tourmente, comme on dit (j'aime bien dramatiser). Heureusement, la chauffeuse est loin d'être une misanthrope puisqu'elle daigne nous ouvrir la porte et avec le sourire (décidément, ça fait deux fois ce soir). Cette fois-ci, la lumière du bus, plus éblouissante que la demi obscurité du train me ramène à la réalité, bien que je sente encore quelques sensations d'antan. Le trajet sera court. Je reviens doucement à moi-même, à demi éveillé, dans une torpeur toute relative. Je sors du bus... tranquillement.

La pluie a laissé la place à une bruine fraîche accompagnée d'un vent glacial. Dans la cour de cette immense résidence, que j'aime à appeler "le melting pot local", il n'y a personne "c'est l'heure de manger... et d'ailleurs, j'ai faim" Ce qui n'est pas étonnant puisque, comme tous les jeudi, notre pizzaiolo s'est installé sur le parking... Ah, cette bonne odeur de pain chaud ! Mais je n'ai pas d'argent sur moi et je doute qu'il ait un lecteur de cartes. Tant pis ! Je me dirige doucement vers la porte d'entrée de mon immeuble, seul. Bientôt chez soi !

Pas de courrier. Un seul étage à gravir, j'ai envie de me laisser tomber sur le canapé. J'ouvre la porte qui mène à mon petit nid douillet et y pénètre enfin. Il est 20h. Je n'ai envie que d'une seule chose : une bonne soupe potiron fromage crème fraîche qui doit traîner dans un coin. Mais, avant tout, j'ai encore besoin de ce rêve nostalgique éveillé. Pour me garantir ce voyage, je n'hésite pas à mettre un CD "de l'époque" qui transporte avec lui toute la signification de ces instants passés.

Ah, l'odeur d'un allumette craquée et du gaz que l'on allume... Me ramène aux Antilles quand j'avais 7 ans. En Martinique, sur la plage de la Tartane. Les bananes, le rhum que je ne buvais pas encore, l'arbre à pains... Du pain... Que je vais mettre avec ma soupe après l'avoir fait grillé un petit coup. Miam.

Et je m'assois, là, sur mon fauteuil. Tranquille. Je délaisse mon sens visuel pour me consacrer aux quatre autres. Je mange doucement ma mixture, réminiscence des soirées avec les grands-parents (car nul n'est censé ignorer combien ces derniers savent faire des soupes toutes plus diversifiées les unes que les autres) et continue de flotter dans ces moments, en me demandant le pourquoi du comment, les conséquences d'hypothèses impossibles, en créant éventuellement un futur qui aurait existé dans un monde parallèle certainement contiguë au nôtre... Qui sait...

Afin d'atterrir en douceur, quelques trente minutes supplémentaires sur un jeu vidéo fort en saveur mais réédité sur une console plus récente : Shining Force. Pour le coup, il a vraiment le goût de la madeleine (puisque l'anecdote veut que, adolescent, je vînt chez un ami tous les mercredi après-midi durant lesquels nous jouions aux jeux vidéos... en mangeant des madeleines fourrées à l'abricot... M. Proust ne serait donc pas le seul.)

De retour sur terre, je me dirige vers mon PC, histoire d'aller partager ce retour à moi-même avec d'autres personnes, nostalgiques comme moi, pas forcément des mêmes choses, pas des mêmes instants, pas des mêmes moments, pas avec les mêmes saveurs, mais qui comprendront toute l'essence se dégageant d'une telle expérience, aussi courte fut-elle...

Je vous souhaite une bonne soirée

Modifié le 25 novembre 2005 par Ti Dragon

[popolatortue]

:'(

* suis toute émotionnée parce ce que tu as écrit*

[sherifdelespace]

o le c*n....je commence à avoir larme à l'oeil (et pas l'arme à droite!)...C'est bon la nostalgie et en meme temps c'est triste...ba je retourne écouter la musique des voyageur du temps pour prolonger cet agréable moment

[Mafio]

Et le truc drole il et ou ?

[Ti Dragon]

:'(

* suis toute émotionnée parce ce que tu as écrit*

Faut pas pleurer. C'etait juste histoire de raconter une sensation

o le c*n....je commence à avoir larme à l'oeil (et pas l'arme à droite!)...C'est bon la nostalgie et en meme temps c'est triste...ba je retourne écouter la musique des voyageur du temps pour prolonger cet agréable moment

C'est triste et c'est beau C'est aussi un grand moment de bonheur quand on le partage.

Et le truc drole il et ou ?

Ben... justement, y'a rien de specialement drole

Je l'ai mis dans la foire au jambon ne sachant s'il fallait mettre ces elucubrations dans les discussions generales ou pas.

Il s'agissait juste d'un petit recit. Merci a ceux qui ont lu (ou liront) jusqu'au bout Ca fait toujours plaisir.

[Kékidi]

Extrait de :

"Pourquoi les rouages du temps nous emportent inéluctablement vers la nostalgies?"

de "Ti Dragon"

des éditions "Robert Afond".

Il sort quand ton bouquin?

[Julio]

C'est très bien écrit, et je retrouve certains sentiments que j'éprouve parfois, qui sont pas facile du tout à expliquer. Vraiment chouette Ti Dragon

[Ti Dragon]

Ah ben, je pensais pas que j'aurais "autant de succes" Merci pour ces retours positifs. Je ne pense pas qu'il en sorte un bouquin (et aux editions Robert Afond en plus ) J'avais juste envie d'ecrire un petit quelque chose, comme ca (a chaud car je rentrais effectivement du boulot ).

Si ca vous plait, j'essaierai d'ecrire d'autres choses mais ces moments d'inspiration sont relativement rares. Essayez-vous

[R O C K]

Très sympa et il m'est arrivé la même chose avec le putain de vent et cette grognasse de pluie qui me fouetent la tronche, bordel...

Je suis moins poétique je sais.

[G2LOQ]

C’est vraiment un très jolie texte (encore )

[leo03]

C’est vraiment un très jolie texte (encore )

ouaip je confirme, c'est très bien ecrit Malgrès les fautes d'orthographes

[Kékidi]

Ouaip je confirme, c'est très bien écrit . Malgrès les fautes d'orthographes

C opital ki s moke d la chariT !

[Ti Dragon]

ouaip je confirme, c'est très bien ecrit Malgrès les fautes d'orthographes

Oue, me suis pas relu : j'ai ecrit le texte a peu pres comme il venait (sans compter que je suis sur un QWERTY et que j'avais passe mon clavier en mode Fr AZERTY ). Donc il est plus que probable et possible qu'il y en ait

Modifié le 25 novembre 2005 par Ti Dragon

[dogo]

Ca m'a rappeler un paquet de super bon souvenirs ton texte . Merci pour ce très beau texte t'étais pas poète ou écrivain dans une vie antérieure parce que c'est super bien tourné.

Très sympa et il m'est arrivé la même chose avec le putain de vent et cette grognasse de pluie qui me fouetent la tronche, bordel...

Je suis moins poétique je sais.

ROCK ou la manière de simplifier les choses

[Death Adder]

Tres sympa tout ça

Zut alors y a pas de "chute" à la fin

[Ti Dragon]

Tres sympa tout ça

Zut alors y a pas de "chute" à la fin

Renversant, non ? (si ca c'est pas du jeu de mots pourri... )

Merci pour les retours Je pense cependant que vous seriez tous capable d'en faire autant (avec ou sans le style percutant de ROCK ). Ce pourrait etre un exercice amusant de tous vous voir faire un petit recit sur "ce que vous voulez". On en fait un recueil Emu Nova ?

[Yahiko]

Vraiment superbe

J'aime beaucoup, c'est bien écrit, ça mérite un grand bravo

[dogo]

Renversant, non ? (si ca c'est pas du jeu de mots pourri... )

Merci pour les retours Je pense cependant que vous seriez tous capable d'en faire autant (avec ou sans le style percutant de ROCK ). Ce pourrait etre un exercice amusant de tous vous voir faire un petit recit sur "ce que vous voulez". On en fait un recueil Emu Nova ?

Je serais plus dans le style de ROCK

[Sigfrodi]

ROCK ou la manière de simplifier les choses

On peut encore plus simplifier : "temps de merde."

Très joli texte de Ti Dragon en tout cas

[Mafio]

Faire chacun un texte pq pas;) Apres il faut attendre le bon moment pour avoir envie de raconter...

[Ti Dragon]

Faire chacun un texte pq pas;) Apres il faut attendre le bon moment pour avoir envie de raconter...

En effet. En meme temps, on n'est pas oblige de raconter la realite. Pourquoi pas raconter un reve, une realite "deformee" (selon un point de vue, par exemple).

M'enfin... j'admets aussi qu'il faut avoir envie d'ecrire

(et merci Sig, aussi )

[masterlol]

Yop!! Je viens de tomber sur ton texte, et je dois dire (je suis pas seul apparement) que j'ai beaucoup aimé. Non vraiment j'ai trouvé ça très chouette, c'est bien écrit et j'ai même pu retrouver des impressions des sentiments que j'éprouve parfois quand je quitte le bureau ou au moment où je passe le pas de ma porte, à croire que l'ona tous une madelaine de Proust en commun.

Bref encore bravo

[Ti Dragon]

Yop!! Je viens de tomber sur ton texte, et je dois dire (je suis pas seul apparement) que j'ai beaucoup aimé. Non vraiment j'ai trouvé ça très chouette, c'est bien écrit et j'ai même pu retrouver des impressions des sentiments que j'éprouve parfois quand je quitte le bureau ou au moment où je passe le pas de ma porte, à croire que l'ona tous une madelaine de Proust en commun.

Bref encore bravo

Merci

Et puis, y'a pas à dire, c'est bon les madeleines (wouah ! 217 lectures... si seulement les 217 personnes étaient toutes différentes et avaient lu le texte en entier... La star )

Euh... *hm*

[Powanono]

C'est vraiment pas mal et trés interessant à lire .

Sur qu'il y'a un petit coté "proustien" dans ton essai .

Prend pas la grosse téte ou je cherche les défauts

[Ti Dragon]

Prend pas la grosse téte ou je cherche les défauts

Oulah, pas de risque ! Je pensais meme pas que les gens apprecieraient autant. Je trouve mon style plutot fade... Mais c'est peut-etre justement parce que je me connais bien, qui sait... Ceci dit (je sais, j'utilise souvent cette expression : heureusement que j'ai deja un pseudo ou j'aurais termine comme Kékidi - j'imagine bien les gens qui m'appellent "Seucidi" ), ceci dit, disais-je, je suis tres touche par vos reactions

(merci aussi )